L'héritage volé

L'héritage volé

par Valerie Duplessis,
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Elle se déplace dans les montagnes. C’est la tempête, le vent, la neige, les éléments se déchaînent sur elle. Même la nature essaie de l’arrêter. Elle aussi sait ce qui a été volé, il faut l‘arrêter. Malgré la fatigue, le froid, elle persévère. Un pas à la fois, elle avance. Dans sa combinaison de plastique blanc, elle se fond dans la masse. À la fine pointe de la technologie, sans celle-ci, elle serait morte il y a bien longtemps. Son sac est lourd sur ses épaules, mais assez léger pour être inquiétant. Les provisions avec lesquelles elle est partie étaient déjà maigres, il n’en reste presque plus. Voler l’objet le plus précieux de la communauté a tendance à vous rendre très populaire et recherché. Elle n’avait pas le temps de faire quoi que ce soit d’autre. Pourtant, elle ne regrette pas son choix. Il n’y avait aucune option. Ce qu’elle a découvert… ce que les autorités, ce qu’elle a participé à faire… Pas le temps d’y penser. Il faut continuer à avancer. La tempête ne fait qu’empirer, la température baisse. Le soleil au loin commence à décliner, et avec lui, la température chute encore. Ce n’est pas bon signe. Dans les montagnes, une telle tempête dans le noir peut être fatale, même dans une de ces combinaisons faites pour ces voyages extrêmes au-delà des murs de la communauté.

Elle tâtonne sa poche. Tout va bien. La bosse dans sa poche lui indique qu’elle n'a pas perdu sa cargaison précieuse. Si elle avait tout sacrifié pour ensuite la perdre dans la neige — et avec elle, tout son travail acharné — ce serait en effet assez pathétique. Elle n’avait pourtant pas le choix. Pour les milliers de personnes dans sa communauté, mais surtout pour son petit frère, lui qui n'avait pourtant rien fait, n'y rien demander...

Elle était seule au monde maintenant, isolée dans son laboratoire jour après jour, le nez toujours collé à son ordinateur. Pas étonnant qu’elle n’ait rien vu. Elle était tellement absorbée par son travail qu’elle ne sortait jamais, n’avait pas d’amis. Toute une vie qu’elle menait... Chaque jour comme le précédent. Jusqu’à ce qu’elle entende cette maudite conversation, qu’elle comprenne tout ce qu’on lui avait caché. Ce qui c'est passé par la suite, elle ne s’en rappelle plus. Un moment, elle s’apprêtait à cogner à la porte de son superviseur, le prochain elle se trouvait dans la salle du réacteur. Un mot de passe, une reconnaissance faciale, un scan de sa rétine, puis elle l’avait. Un petit morceau de métal plat et carré, pas plus grand que sa main. Pourquoi n’a-t-elle pas pu se résigner à le détruire ? Elle n’en sait rien. Tout ce qu’elle savait, c’est qu’elle le regrettait amèrement. Puisqu’elle ne pouvait le laisser entre les mains des dirigeants, il fallait qu’elle parte. Où ? Peu importe, mais le plus loin, le mieux. Il devait y avoir refuge quelque part parmi les montagnes. Elle avait entendu des rumeurs d’une résistance. Des personnes qui réussissaient à vivre en dehors des murs de la société qui les protégeait. Peut-être saurait-il quoi faire avec ce fichu disque.